Juliette Capulet, l’insoumise

Nous sommes à Vérone, en Italie, à la fin du XVIe siècle. La ville est le théâtre d’un affrontement entre deux familles rivales, les Montaigu et les Capulet. Roméo Montaigu et Juliette Capulet tombent amoureux l’un de l’autre, alors que leurs noms les destinaient plutôt à se haïr, sans qu’ils sachent véritablement pourquoi.

Ils se marient en secret sous la bénédiction du frère Laurent, qui voit là l’occasion de rapprocher les deux familles. Un enchaînement malheureux d’évènements entraine l’excommunication de Roméo. Avant de quitter la ville, il parvient à passer la nuit avec Juliette. Mais les Capulet sont bien décidés à voir leur fille mariée au comte Pâris.

Afin d’éviter cet union arrangé, Juliette va demander de l’aide au frère Laurent qui lui donne une potion afin de simuler sa mort. Une fois sa dépouille déposée dans le caveau des Capulet, Roméo, qui sera prévenu du subterfuge grâce à une lettre, la retrouvera, la réveillera, et l’emmènera avec lui. Le plan se déroule à merveille, à l’exception que Roméo ne reçoit jamais la lettre et croît véritablement que sa femme n’est plus de ce monde. Il se rend au tombeau, rencontre et tue le comte Pâris et, fou de chagrin, se donne la mort en buvant du poison. Juliette se réveille peu après et trouve son amoureux inanimé à ses côtés. Elle se suicide à son tour, à l’aide du poignard du jeune Montaigu. 

Il est difficile de séparer Juliette de Roméo. Et pourtant : pour de nombreux critiques, Roméo est plus amoureux de l’amour que de Juliette : avant de la rencontrer, ce dernier se disait éperdument amoureux de Rosaline, bien vite oubliée. Juliette, par contre, s’inscrit dans une tradition classique : nombre de figures tragiques sont des femmes. Elle marche donc sur les pas d’Antigone ou de Médée.

Pourquoi Juliette est-elle la plus connue ? Peut-être parce que Shakespeare  était friand de personnages féminins intenses, et que son talent lui a permis de dresser un portrait magnifique de la jeune fille. Mais c’est surtout parce que la portée de la pièce est encore très grande : si Antigone se rebellait contre l’État, Juliette va à l’encontre de la volonté de sa famille. Mais attention : il ne s’agit pas d’une crise d’adolescence. Juliette est avant tout une jeune femme qui s’émancipe des lois arbitraires qui régissent sa vie, une jeune femme qui revendique son droit à choisir elle-même sa propre destinée. Car si, comme dans toute tragédie, le sort des protagonistes est scellé dès le début, c’est en choisissant la mort plutôt que la servitude que Juliette est devenue une figure universelle, un véritable mythe qui ne cesse d’inspirer la culture populaire d’aujourd’hui.